La kinésithérapie est essentielle lors d’un cancer du sein !
Interview de Dorothée Delecour
Masseur-Kinésithérapeute – Présidente du Réseau RKS
Par Medicite.fr
Dorothée Delecour, présidente du RKS (Réseau Kinésithérapeutes du Sein), une association qui regroupe 1500 kinésithérapeutes ayant suivi une formation spécifique en sénologie, nous explique.
Les femmes ignorent souvent qu’elles peuvent bénéficier d’un suivi, n’est-ce pas ?
Malheureusement. Souvent car les médecins n’en parlent pas. On a trop longtemps réduit le travail du kinésithérapeute à la problématique du “gros bras”, un oedème consécutif à l’ablation des ganglions.
Si 30% des femmes souffraient de ce problème il y a 20 ans, ce n’est plus le cas aujourd’hui car les chirurgiens préservent les ganglions autant qu’ils le peuvent grâce à la technique du ganglion sentinelle. Du coup, les médecins ne pensent plus à la kinésithérapie pour palier les autres conséquences des chirurgies !
C’est vraiment dommage car le kinésithérapeute peut jouer un rôle important tout au long du parcours de soin. Mais les choses évoluent dans le bon sens et les médecins prescrivent de plus en plus.
Quel est l’intérêt d’un tel parcours de soin ?
Il est pluriel. Nous pouvons comme auparavant réduire l’œdème en cas de gros bras en faisant du drainage lymphatique. Tout comme nous pouvons intervenir sur l’épaule au besoin, qui peut devenir raide suite à la chirurgie et la radiothérapie. La kinésithérapie permet ainsi de regagner en amplitude de mouvement. Mais surtout aujourd’hui nous ciblons avant tout le sein de la femme et un travail plus global, car souvent le bras va bien !
Quels sont les problèmes les plus courants que vous traitez ?
Certaines femmes ont des seins douloureux, d’autres ont des fibroses, un sein dur, cartonné… La kinésithérapie permet aussi de limiter les séquelles des opérations et des traitements. L’aspect esthétique ne doit pas non plus être négligé, car nous pouvons agir sur les cicatrices.
Enfin, la sensibilité du sein peut être altérée par le cancer et les traitements (le sein devient très sensible ou au contraire insensible), notamment quand certaines terminaisons nerveuses ont été endommagées. Là encore, le kiné a un rôle à jouer en aidant les femmes à se réapproprier leur corps mutilé.
A quel moment, idéalement, commencer cette rééducation kiné ?
Nous pouvons intervenir dès 10 jours après l’opération, quel que soit le type de chirurgie, en accord avec le chirurgien. Mais avant la chirurgie, c’est encore mieux ! Les femmes sont ainsi sensibilisées et peuvent appliquer nos conseils (ne pas rester le coude collé au corps par exemple) ou faire des exercices dès le lendemain du bloc, à condition de respecter la douleur bien sûr.
Cela permet de nettement réduire le nombre de semaines de rééducation et aussi de la faciliter. Plus on attend, plus l’épaule peut s’enraidir et plus long et difficile sera le retour à la normale.
Que prévoit le protocole ?
En principe, toutes les femmes devraient avoir un rendez-vous kiné dix jours après l’opération pour faire un bilan post opératoire et poursuivre si nécessaire la rééducation qui peut durer un an (parfois deux). On accompagne ainsi les femmes tout au long des traitements et après.
Pour les femmes dont la reconstruction est à distance (30% des patientes), l’intérêt est multiple. On joue un rôle de conseil sur les différentes chirurgies. On assouplit la peau et toute la zone pour faciliter la reconstruction car on prépare la zone donneuse et la zone receveuse, manuellement ou mécaniquement avec par exemple la technique LPG. On peut ainsi consacrer 8 à 10 séances en ce sens.
Que faire si on n’a pas pu bénéficier de cette rééducation pendant les traitements ?
Il n’est jamais trop tard ! On peut tirer un bénéfice des interventions du kinésithérapeute des années après les traitements. Tant qu’il y a des problématiques (douleurs, raideurs, insensibilité…), on peut toujours agir. Et cela ne change rien à la prise en charge, tout est remboursé quand on est en ALD (Affection Longue Durée, NDLR).
Attention en revanche à impérativement vous rapprocher d’un kinésithérapeute sénologue, formé pour cet accompagnement spécifique.
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Kiné du sein rééducation pré et post chirurgie